RACONTE-MOI UNE HISTOIRE #1
Christofle et l’esprit d’innovation
« Vendeurs, devenez des conteurs ! »
Depuis quelques années, le storytelling s’est invité dans les programmes de formation à la vente. Exit les hard skills, place aux heart skills, ces compétences qui font vibrer votre client jusqu’au bout de son nez. De vendeur à conteur, il n’y aurait qu’un pas. Certes, mais personne ne précise l’amplitude de ce pas.
Fermons les yeux un instant.
Paris, 1820… Un certain Charles, 15 ans, entre en apprentissage chez son beau-frère orfèvre. Il y découvre avec délice les secrets de la matière et du métal qu’il plie bien vite à ses désirs. Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années. A 25 ans, le voilà qui prend les rênes de la Maison et lui donne son nom : Christofle. En quelques années, il met l’Europe à ses pied.
Au XIXe siècle, Paris présente une société en pleine mutation. La Révolution française, éradiquant la noblesse, a jeté dans les rues ses cuisiniers. Les restaurants fleurissent, la révolution industrielle modèle une bourgeoisie assoiffée de reconnaissance et aspirant à montrer sa puissance. Dans les maisons cossues, chaque pièce a son usage, et comble du luxe, on consacre une salle aux repas. On y dîne en famille ou avec des amis, en étalant avec ostentation sa nouvelle richesse. Le hic ? L’argenterie coûte cher. Désespérément cher. Et c’est là que Charles a une épiphanie. En 1842, il rachète un brevet qui décoiffe : la dorure électrolytique et l’argenture. Un tsunami. Le métal argenté. L’argenterie chez soi. La démocratisation d’un rêve jusque-là inaccessible. Christofle invite le monde à la table des rois.
Charles, un visionnaire ? Oui. L’époque est propice à l’ébullition. Au même instant, un fils de charpentier tout droit débarqué de son Jura natal se pique de fabriquer des malles. Il s’appelle Louis. Son ère le fascine et il compte vivre avec son temps. Innover avant tout. Les malles à couvercle plat, les malles-lits, que du fonctionnel, du pratique, du moderne pour une société affamée de voyages. L’innovation frémit à travers tout le siècle.
Eh bien, me direz-vous, quel rapport avec la vente ?
L’innovation est le maître-mot. Charles et Louis sont enterrés depuis longtemps mais leur esprit subsiste dans chaque vente au sein de leurs boutiques. Innover, innover encore pour perdurer, voici le secret. Charles, Louis et les autres étaient des artisans. Des génies de la création. Et si on leur avait dit qu’ils deviendraient aussi célèbres, ils en auraient bien ri. L’artisan passe des heures, des jours et des semaines à observer sa matière et peaufiner son chef-d’œuvre. L’artisan crée une pièce, le vendeur la vend. Il devient le dépositaire du travail de l’artisan et artisan lui-même d’une relation-client qu’il façonne avec patience. Le web déborde d’articles sur l’importance des soft skills, de l’empathie, de l’écoute active et de l’art du small talk. Oui, oui, oui et encore oui ! Mais… pas sans l’artisanat. Ne soyons pas des courtisans mais bien des artisans de notre relation-client. Et pour cela, innovons ! Encore et toujours. Osons observer, nous adapter, repousser les limites du schéma de la vente classique, sortir des sentiers trop battus. Comme la Maison Christofle, célébrons chaque moment important de la vie de notre client, de la naissance au mariage et bien plus encore. Offrons sans attendre en retour. Envoyons messages et attentions, n’oublions pas un anniversaire ! Un petit mot personnalisé, cela ne coûte rien mais fait toujours plaisir. Téléphonons, whatsappons, textotons, offrons une gravure pour ne jamais oublier, mais toujours avec élégance. Dans son livre Non merci, je regarde, Constance Calvet emprunte à Sophie Chassat l’expression de Sprezzatura : « Eviter le bling-bling, ne pas en faire des tonnes. Rien de compassé, de guindé, de maniéré, de pincé, de théâtral. » Du courtisan à l’artisan. CQFD.
Depuis novembre 2024, Paris scintille d’une magnifique exposition : Christofle, une brillante histoire, aux Arts Décoratifs jusqu’au 20 avril 2025. Christofle argente nos vies depuis près de 200 ans. Chez The Wind Rose, nous portons une affection toute particulière à cette Maison. D’abord parce qu’elle nous fait confiance, ensuite, parce que Constance, fondatrice du cabinet, descend directement du grand Charles lui-même, inscrivant son nom dans cette lignée… côté expérience client. De l’artisan de la pièce à l’artisan de la vente, il n’y a jamais qu’un pas.
Chez Christofle, on polit plusieurs fois chaque dent de fourchette, patiemment, lentement, jusqu’à l’éclat parfait. Prenons le temps de polir notre relation-client dans une douce ode à la lenteur. Dans certaines familles, les couverts Christofle se transmettent de main en main depuis plus de cent ans, dans d’autres, les montres Patek Philippe, dont on est « le gardien pour les générations futures ». A l’instar d’un prénom sur une timbale en argent, la relation-client se grave au cœur du temps, pour autant qu’on prenne la peine de la cultiver sans jamais lasser.
Alors, à vous de jouer !
Quel est votre secret pour innover ?
Aurélie Leborgne
Février 2025
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